Bientôt une loi européenne sur la restauration de la nature ?
Ce 22 juin 2022, la Commission européenne a publié une proposition de loi sur la restauration de la nature comprenant des objectifs juridiquement contraignants ! Pour la fédération d'associations environnementales BirdLife International, dont Natagora est le partenaire en Belgique francophone, cette loi peut mettre les écosystèmes dégradés de l'UE sur la voie du rétablissement.
Ci-dessous, une traduction du communiqué de presse publié par BirdLife le 22 juin 2022.
La proposition de la Commission est une étape importante ; il s'agit du premier texte législatif majeur de l'UE en matière de biodiversité depuis la directive "Habitats" de 1992. Nous appelons à son adoption et à sa mise en œuvre urgentes car il s'agit d'une tentative réelle et forte d'inverser la tendance à la perte de biodiversité et au changement climatique. Le Parlement européen et le Conseil de l'UE doivent approuver pleinement les éléments positifs et renforcer les faiblesses existantes sans délai.
Éléments forts
Le texte comprend des éléments forts tels que l'objectif global de mesures de restauration par zone sur 20 % de la superficie terrestre et maritime de l'UE d'ici 2030, ainsi que des obligations de restauration assorties de délais pour les habitats naturels, couvrant les écosystèmes terrestres, côtiers, d'eau douce et marins. Ces mesures ont le potentiel d'améliorer l'état de la nature à grande échelle.
Les objectifs axés sur les résultats pour la restauration des écosystèmes agricoles et forestiers revêtent également une grande importance. Ils obligeront les États membres à progresser dans la reconstitution des espèces vulnérables et de leurs habitats dans les paysages terrestres et marins actuellement surexploités par des pratiques intensives. Ces objectifs ont fait l'objet d'une pression extrême de la part des secteurs primaires désireux de conserver leurs activités de production à fort impact.
Parmi les autres éléments positifs, citons de fortes obligations de non-détérioration afin de garantir que les sites restaurés bénéficieront à long terme à la biodiversité et au climat. En outre, il est bon de voir que les États membres devront élaborer des plans de restauration nationaux comportant les éléments clés sur ce qu'il faut restaurer, où et comment le financer. L'examen de la Commission et l'obligation qui en découle pour les États membres d'adapter leurs plans en conséquence sont également prometteurs pour garantir que les plans soient réellement efficaces.
Ce qui doit être amélioré
Nous [ndl, entendez : "BirdLife International"] allons travailler avec le Parlement et le Conseil pour améliorer la proposition dans le cadre du processus de codécision. Les éléments clés sont les suivants :
- En ne parvenant pas à surmonter le risque d'impasse posé par la procédure inefficace de la politique commune de la pêche pour gérer les impacts destructeurs de la pêche, les objectifs de restauration marine risquent d'être inapplicables et vides dans la pratique. Un mécanisme de sauvegarde devrait donc être ajouté pour garantir que la Commission puisse sortir de l'impasse si les États membres ne parviennent pas à s'entendre sur les mesures requises pour atteindre les objectifs de restauration.
- S'il est positif qu'il existe un article distinct sur la restauration des rivières et des plaines inondables, la loi devrait contenir des objectifs quantifiés et limités dans le temps pour supprimer les obstacles. Les États membres devraient être tenus de restaurer 15 % de la longueur des rivières (178 000 km) en rivières à écoulement libre d'ici 2030, ainsi que de restaurer les plaines inondables.
- Les objectifs relatifs à la réimperméabilisation des tourbières devraient être renforcés de manière à ce qu'une part plus importante des tourbières utilisées à des fins agricoles soit réimperméabilisée sans échappatoire. Les tourbières drainées représentent 5 % du total des émissions de gaz à effet de serre de l'UE. La loi sur la restauration de la nature doit donc contenir des objectifs forts en matière de réhumidification des tourbières afin de garantir que celles-ci stockent du carbone au lieu d'en émettre.
- L'architecture de conformité doit être rendue plus robuste pour permettre l'application et le suivi adéquat, en veillant à ce que chaque État membre contribue équitablement à l'objectif global.
Crédits photos : tourbières Estonie Caroline Herman