Liberté d'association : un droit fondamental menacé

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Natagora soutient l’appel des organisations de défense des droits humains.

Depuis début novembre, une large coalition d’organisations de défense des droits humains alerte sur un avant-projet de loi du ministre de la Sécurité et de l’Intérieur, Bernard Quintin. L’avis du Conseil d’État est toujours attendu. Natagora souhaite relayer cet appel et attirer l’attention sur les risques que ce texte fait peser sur la liberté d’association.

Le 18 juillet dernier, le Conseil des Ministres du gouvernement fédéral a approuvé un avant-projet de loi créant "un cadre juridique qui permet d’interdire certaines organisations dangereuses". Cet avant-projet a été soumis au Conseil d'Etat pour avis

Si l’objectif affiché de protéger les citoyens peut sembler légitime, le projet de loi, tel qu’il est rédigé aujourd’hui, ouvre la porte à de nombreux risques. Le texte prévoit une procédure rapide permettant au gouvernement de dissoudre une association, sans passer par un juge. Cette possibilité viserait aussi des collectifs informels, qui n’ont pourtant pas d’existence juridique. Les conséquences seraient lourdes : une association pourrait être interdite, ses biens gelés, et des personnes risqueraient la prison simplement pour avoir participé à ses activités.

L’Institut fédéral des droits humains (IFDH) alerte sur les atteintes importantes que ce projet ferait peser sur la liberté d’association et la liberté d’expression. Il souligne notamment que le texte pose de sérieux problèmes juridiques : les règles proposées ne sont pas suffisamment claires ni proportionnées. Plusieurs notions centrales, comme le « radicalisme » ou le « détournement de finalité », ne sont pas définies précisément, ce qui laisse une grande liberté d’interprétation au pouvoir exécutif.

Enfin, le projet réduit fortement les garanties de défense des organisations visées. Or, selon le rapporteur spécial des Nations unies sur la liberté d’association, dissoudre une organisation doit rester une mesure exceptionnelle : elle ne peut être envisagée qu’en cas de danger grave et immédiat, et uniquement sur décision d’un tribunal.

Natagora est une association. Notre action repose sur l’engagement citoyen, le débat public et la liberté de s’organiser collectivement pour défendre l’intérêt général. Le droit d’association est une condition indispensable de notre travail, comme de celui de nombreuses organisations actives dans la protection de la nature, des droits humains et de la démocratie.

C’est pourquoi nous soutenons l’appel de la coalition « Droit de protester », aux côtés notamment d’Amnesty International Belgique, de la Ligue des droits humains, de Greenpeace et des organisations syndicales. Alors que l’avis du Conseil d’État est toujours attendu, nous resterons attentifs à l’évolution de ce dossier : une atteinte à la liberté d’association concerne l’ensemble de la société civile.

Photos : Michel Garin