Le loup face au recul des mesures de conservation : quels enjeux et comment agir ?

Publié le jeu 19/12/2024 - 08:53

Le 3 décembre 2024, les 50 États membres de la Convention de Berne ont voté pour rétrograder le loup d’« espèce strictement protégée » à « espèce protégée ». Cette décision, initiée par l’Union européenne, affaiblit les mesures de conservation d’une espèce emblématique et cruciale pour nos écosystèmes. Si le loup n’est pas menacé de chasse en Belgique pour autant, c’est un signal inquiétant pour la protection de la biodiversité. Retour sur les enjeux de cette décision et des pistes d’actions. 

Le loup, autrefois exterminé dans de nombreuses régions européennes, a fait son retour grâce à des décennies d’efforts de conservation. En 2023, on comptait 20 300 individus à travers le continent. En Belgique, les populations restent modestes : 20 à 25 loups répartis en Wallonie, principalement dans les Hautes-Fagnes. 

Une décision politique, pas écologique

L’Union européenne justifie ce changement par une augmentation des populations de loups et des attaques sur le bétail, estimées à 65 500 par an. Mais ces chiffres, souvent mis en avant par des lobbys agricoles, occultent la réalité : l’impact global du loup sur le bétail reste faible. En Belgique, la cohabitation est régie par le Plan Loup, qui prévoit des mesures de détection et de suivi, ainsi que des possibilités d’indemnisation en cas d’attaques sur le bétail. Plus important encore, ce Plan Loup soutient les mesures de prévention, telles que l’installation des dispositifs de protection. Ces mesures incluent le travail de la Wolf Fencing Team, une équipe de bénévoles spécialisées dans l’installation de clôtures adaptées, dont le travail est remarquable. 

C’est pourquoi, avec un certain nombre d’associations environnementales, nous avons dénoncé une décision motivée par des considérations politiques, au détriment d’objectifs scientifiques de conservation. 

Quelles sont les prochaines étapes en Belgique et en Europe ?

Au niveau européen, la révision devrait entrer en vigueur en mars 2025. Une fois officielle, cette modification permettra à l’Union européenne de réviser la directive Habitats de 1992, en faisant passer le loup de l’annexe IV, où il est considéré comme une espèce strictement protégée, à l’annexe V, où il bénéficie d’un statut d’espèce protégée. Cette révision introduira également des possibilités accrues d’abattage, bien que celles-ci soient conditionnées au maintien d’un "état de conservation favorable", un critère flou qui pourrait être interprété différemment selon les pays. Cela risque de compromettre les efforts transfrontaliers de conservation.

En Belgique, aucun changement immédiat n’est prévu en Wallonie. La ministre wallonne de l’Agriculture, Anne-Catherine Dalcq, a affirmé à plusieurs reprises que le loup restera une espèce protégée et que la stratégie régionale ne sera pas modifiée. Cependant, des décisions prises dans les pays voisins, comme la France ou l’Allemagne, où la pression pour une régulation accrue est plus importante, pourraient avoir des répercussions indirectes sur les populations de loups en Belgique, que les autorités belges ont annoncé surveiller attentivement. 

Que fait Natagora et comment s’engager dans la protection du loup ?

Le loup n’est pas qu’un symbole : il est un pilier de nos écosystèmes et un indicateur de la santé de notre environnement. En Wallonie comme ailleurs, sa protection est un combat pour l’avenir de notre nature. C’est pourquoi Natagora continue à suivre ce dossier de près, et à promouvoir la cohabitation avec des solutions non létales. 

Grâce à notre fédération au niveau européen, Birdlife, nous suivons les développements autour de la révision de la directive Habitats, et veilleront à ce que ces modifications n’entrainent pas d’autres changements pour cette loi, cruciale pour la protection de la nature. Notre équipe de politique et plaidoyer suit également de près la situation en Wallonie. 

Plus important encore, Natagora comprend un groupe de travail (GT) Loup, composés d’une petite centaine de volontaires qui œuvrent à la sensibilisation et la défense du loup en Wallonie. Le GT est actif à plusieurs niveaux : de la rédaction de positions communes à l’organisation d’actions sur le terrain, il y a pleins de façon de s’engager pour la protection du Loup. Si vous souhaitez en savoir plus et soutenir le travail de ces volontaires, n’hésitez pas à cliquer sur le bouton ci-dessous. 

Photos : Roger Herman