Au Baquet, laissons faire la forêt !
La réserve du Baquet, notamment réputée pour sa richesse en reptiles et en papillons, a récemment bénéficié d’une extension de 64 ha, dont une cinquantaine de forêt ancienne, qui seront placés en réserve intégrale. La forêt pourra donc s’y développer librement.
Le Baquet est un site de haute réputation naturaliste. Situé le long de la frontière française, non loin de Givet, la réserve Natagora accueille en effet l’une des dernières populations de vipères péliades de Wallonie.
Ce terrain maigre et clairsemé, reliquat de l’agropastoralisme d’autrefois, a récemment pris une nouvelle dimension avec l’acquisition de 64 ha, qui porte la superficie de la réserve à plus de 200 ha. Une taille respectable ! Au-delà de ces chiffres imposants, l’essentiel réside sans doute dans le fait que les terrains nouvellement acquis comprennent une forêt ancienne que nous laisserons évoluer naturellement sans intervention humaine.
Laisser faire la forêt
Cette belle forêt, une chênaie-charmaie typiquement fagnarde, retrouvera donc ses dynamiques naturelles, au bénéfice d’une riche biodiversité. Le modèle, ici, c’est la forêt primaire*. « La forêt primaire est l’écosystème ayant la résilience et la biodiversité les plus élevées », rappelle Jean Delacre, l’un des conservateurs du Baquet. En somme : laissons-faire la forêt, elle se débrouille très bien toute seule !
Concrètement, l’arrêt de l’exploitation sylvicole entraînera une augmentation de la quantité de bois mort sur pied et au sol, qui servira de refuge et de nourriture pour une faune et une fonge abondante et souvent méconnue. On estime jusqu’à 30% la part de la biodiversité forestière qui dépend des stades de sénescence du bois. Champignons, mousses, nombreux insectes, chauves-souris et oiseaux y prospèrent, à l’image d’une variété de pics qui dépendent de ce stock de bois vieillissant ou mourant.
Des actions de gestion ciblées
Outre cette forêt ancienne, les terrains acquis contiennent un peuplement d’épicéas/douglas et un lambeau de forêt claire. Ces zones bénéficieront d’actions de restauration telles que la création de prairies fleuries, de lisières ensoleillées et de friches arbustives favorables aux espèces à protéger ici en particulier les reptiles et les papillons.
Ces actions valent d’être menées, comme en témoignent les résultats de récents inventaires qui ont mis en avant la richesse biologique extraordinaire du site, avec, notamment, plusieurs papillons de nuit rarissimes en Wallonie.
Qu’est-ce que c’est ?
Forêt ancienne : au regard de la réglementation wallonne, les « forêts anciennes » désignent des zones boisées de manière continue depuis l’époque de référence, définie par les cartes de Ferraris (vers 1790). Leur conservation est prioritaire aux yeux de la Région wallonne et de l’Europe.
Forêt primaire : la forêt primaire désigne l’état d’une forêt qui n’a pas été impactée par les actions de gestion et d’exploitation menées par les hommes. Il ne subsiste pratiquement plus de forêt primaire en Europe occidentale.
Forêt en libre évolution et RBI : le statut de Réserve biologique intégrale (RBI) signifie qu’une forêt ne sera plus gérée ni exploitée pour la production de bois. Le bois mort est laissé sur pied et au sol. Des dynamiques naturelles se remettent alors en place, impliquant une biodiversité plus abondante. En théorie, la libre évolution permet de se rapprocher graduellement de l’état « primaire ».