Bsal, le tueur invisible…

Publié le jeu 21/11/2024 - 13:47

Un champignon décime les populations de salamandres en Europe, souvent dans l’ombre, sous terre. Une étude récente, commandée par le Département de la Nature et des Forêts de Wallonie et menée par les herpétologues de Natagora, révèle une chute drastique des densités en Wallonie, laissant craindre une propagation bien plus large. Natagora appelle les promeneurs à la vigilance.

Bsal, c’est le diminutif de Batrachochytrium salamandrivorans, le champignon responsable de la "maladie des salamandres" qui touche actuellement les Pays-Bas, l’Allemagne et la Belgique. On en parle assez peu, et pour cause : quatre ans se sont passés entre les deux derniers cas avérés (découverte de cadavres testés positivement, par analyse génétique) en Wallonie, tous deux situés dans la vallée de la Vesdre liégeoise, respectivement en janvier 2020 (Olne) et en janvier 2024 (Gomzé-Andoumont).

Cette situation pourrait donner l’impression que la maladie ne se répandrait que lentement et resterait actuellement circonscrite à une zone restreinte. La réalité pourrait être tout autre : généralement, les mortalités – massives, elles concernent alors la quasi-totalité des individus des populations infectées – touchent les salamandres lorsqu’elles sont dans leur cachette souterraine, se pensant bien à l’abri de toute menace. Les très nombreux cadavres ne sont alors bien sûr jamais découverts.

La disparition silencieuse des salamandres : des chiffres alarmants

Une étude réalisée par Natagora entre l’automne 2022 et le printemps 2024, dans et autour des 7 populations que l’on savait infectées ou pour lesquelles on avait des suspicions, a mis à jour une situation très inquiétante : dans les 21 massifs forestiers prospectés du quart nord-est de la Wallonie (depuis la frontière hollandaise au nord et jusqu’à La Roche au sud), 19 présentaient des densités de salamandres anormalement basses. Jugez plutôt : alors qu’on en dénombre généralement plusieurs dizaines, voire plus, par kilomètre de chemin forestier en bonnes conditions météo, à peine 42 salamandres ont pu être trouvées sur près de 140 km parcourus ! Ces très faibles densités, de l’ordre d’une salamandre tous les 3 km environ en moyenne, laissent à penser que la maladie pourrait être bien plus répandue qu’imaginé initialement. Il est à noter que les tests réalisés sur ces rares survivants se sont tous révélés négatifs. Cette situation a aussi été constatée en Allemagne, où Bsal se répand comme une traînée de poudre, touchant actuellement le centre et le sud du pays…

La vigilance des promeneurs est cruciale

Cette maladie se répand par la boue accrochée aux semelles des promeneurs. Il est dès lors très important de bien sécher et nettoyer vos bottes et bottines entre deux balades dans les bois afin d’éviter de la propager !

Toute découverte de cadavres suspects (hors victimes du trafic routier par exemple) doit aussi être signalée à Natagora au plus vite pour nous permettre de suivre au plus près la progression de la maladie en Wallonie. Envoyez vos observations au pôle herpétologique de Natagora via rainne@natagora.be ET renseignez ces observations sur le portail d'encodage de données scientifiques Observations.be ou l'application liée Obsidentify.

Photos : Karl Gillebert