L’étonnant ballet aérien de nos mollusques

Cover revue Aves 59-2
Revue Aves 59-2
Septembre 2022
Photos: Brian Lasenby

De tout temps, limaces et escargots ont profité des oiseaux pour se déplacer et étendre leur aire de répartition. Ce phénomène de dispersion est appelé l’ornithochorie. Johann Delcourt, volontaire passionné, l’a détaillé dans la revue ornithologique Aves 59/2 de Natagora. Découvrez ici un condensé de l’article.

La dispersion des mollusques par les oiseaux est un phénomène peu documenté. Pourtant, cette intervention involontaire des oiseaux permet d’expliquer de nombreux mystères concernant la colonisation de lieux normalement inaccessibles pour ce groupe d’espèces, que ce soit un étang isolé dans la campagne ou une lointaine île océanique. On comprend aussi mieux la dispersion de certaines espèces invasives de mollusques, certaines potentiellement vectrices de parasites. L’étude de cette dispersion permet aussi de mettre en évidence l’utilisation de certaines voies migratoires empruntées par les oiseaux, même dans des temps très anciens. Cet article passe en revue les différents modes de dispersion des mollusques par les oiseaux (ornithochorie), leur efficacité et leur implication.

On distingue en premier « l’ ectochorie active ». Cette dénomination compliquée correspond à l’idée qu’un oiseau va saisir directement un mollusque ou un objet sur lequel se trouve ce dernier (par exemple pour construire son nid) pour l’emmener ailleurs. Ainsi, il arrive souvent qu’un oiseau capture un escargot pour le transporter sur un site qui lui permet de casser la coquille. Dans ce cas, il se peut que la proie survive, parce que l’oiseau l’a lâchée accidentellement ou encore parce qu’elle a été capable de survivre au tractus digestif de ce dernier.

Ectochorie active

 

Dans « l’ectochorie passive », l’oiseau est escaladé par un mollusque qui, s’il dispose de bonnes stratégies d’adaptation, va être capable de s’accrocher à lui et survivre à un vol, parfois en haute altitude.

Il arrive aussi que ce soient des œufs qui survivent à la digestion du mollusque qui a été capturé et se retrouvent dans les fientes de l’oiseau, bien loin de l’endroit où son parent a été pris. On parle dans ce cas « d’endozoochorie ».

Quelle que soit la façon dont l’oiseau a assuré son transport, on rencontre ainsi de nombreux cas où un mollusque a pu couvrir des distances parfois importantes, comprenant des milieux infranchissables pour lui. L’article présente de nombreux exemples, dont celui d’un gastéropode terrestre du genre Tyronia qui, depuis le miocène jusqu’aux temps présents, a colonisé l’Amérique centrale et l’Amérique du Nord selon un schéma qui suit les voies migratoires des oiseaux. Un autre exemple est celui d’un petit escargot terrestre du genre Balea qui a pu coloniser des îles océaniques distantes de plusieurs milliers de kilomètres !

Colonisation d’un petit escargot terrestre du genre Balea

 

En conclusion, il faut garder à l’esprit que chaque observation peut être utile à mieux comprendre la nature. Cela vaut la peine de mentionner mais surtout d’encoder les événements anecdotiques que l’on observe dans la nature (sur la plateforme observations.be par exemple). Ainsi, c’est parce que des ornithologues ont pris la peine de transcrire leurs observations que des spécialistes d’un groupe vraiment éloigné ont pu comprendre l’histoire de la répartition (la biogéographie) de leurs espèces favorites.


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