Le plan wallon pour la future politique agricole est insuffisant selon la Commission européenne

Publié le jeu 16/06/2022 - 11:57

Une fuite de la lettre d’observation de la Commission sur le plan stratégique PAC proposé par la Wallonie révèle que celui-ci est notoirement insuffisant pour répondre aux enjeux du climat et de la biodiversité. Cette lettre arrive à un moment critique, alors que l’enquête publique sur le plan PAC wallon est en cours. La coalition d'associations environnementales Impaacte - dont Natagora fait partie - vous propose une analyse.

Cette semaine, 19 États membres, sous l’influence du puissant lobby agricole COPA-COGECA, ont demandé à la Commission de déroger en 2023 aux réglementations de la nouvelle PAC, qui doivent permettre de sauvegarder la biodiversité des milieux agricoles, instrumentalisant à nouveau la crise alimentaire mondiale. C’est dans ce contexte que l’on apprend que le plan wallon pour la nouvelle PAC est, de l’avis même de la Commission, largement insuffisant pour répondre à ses objectifs alimentaires, climatiques et de préservation de la biodiversité.

Renforcer notre autonomie alimentaire et la résilience de l’agriculture

Dans le contexte de crise mondiale des marchés agricoles, la Commission indique les leviers à activer dans la future PAC. Il s’agit de renforcer la position des agriculteurs dans la chaîne de valeur, en ciblant davantage les investissements en faveur de l’autonomie alimentaire régionale et en mobilisant tous les outils disponibles pour soutenir les regroupements de producteurs, ce que le nouveau plan wallon ne prévoit pas. Il faudra aussi mettre en œuvre des moyens crédibles pour la production de protéines végétales et l’agriculture biologique.

Se fixer un objectif de réduction de l’usage de pesticides de synthèse

Bien qu’elle salue un budget conséquent en faveur de la transition écologique des exploitations, la Commission distribue de nombreux cartons jaunes pour la très faible ambition des mesures environnementales proposées. Elle demande notamment à la Wallonie de se fixer un objectif en matière de réduction de l’utilisation des pesticides de synthèse.

Des objectifs et moyens « extrêmement faibles » pour la biodiversité

Compte tenu de la situation « extrêmement préoccupante » de la biodiversité en Wallonie, la Commission considère que les objectifs proposés pour la gestion durable des forêts, la préservation des habitats et espèces, et la préservation des éléments de paysage sont « extrêmement faibles ». Elle demande à la Wallonie de renforcer les réglementations en faveur de la biodiversité qui conditionnent l’octroi des aides (au lieu de les affaiblir !). Elle appelle à de « nouveaux engagements » en faveur de la biodiversité.

Carton rouge pour le climat

La Wallonie présente une densité de bétail parmi les plus élevées en Europe, après les Pays-Bas et la Flandre. De ce fait, l’élevage bovin est le principal responsable des émissions de gaz à effet de serre du secteur agricole. À ce sujet, la Commission note que le plan propose un soutien à l’élevage bovin parmi les plus importants d’Europe, sans aucun objectif de réduction des gaz à effet de serre. Elle se dit « fortement préoccupée » par cette situation et exige des critères environnementaux stricts pour l’octroi de ces aides.

Des mesures dangereuses pour la biodiversité et les ressources naturelles

En plus des risques associés au soutien de l’élevage bovin dans sa forme actuelle, la Commission pointe les dérives possibles des aides à l’investissement. Dans de nombreux cas, ces aides sont englouties dans des bâtiments d’élevage industriel qui, bien que financés par l’argent du contribuable, échappent souvent aux évaluations d’impact environnemental requises dans des milieux naturels très sensibles.

 

Une analyse plus approfondie du courrier de la Commission européenne a été réalisée par Natagora et est disponible sur le site d'arc2020.